Souvent on me demande d’expliquer ce qu’est la socio-esthétique ou la psycho-socio-esthétique, et quels sont les bénéficiaires ? Quelle différence avec une esthéticienne dite “traditionnelle”. Nous sommes bien sur et avant tout des esthéticiennes, mais nous pratiquons en plus de l’esthétique différemment dans le but de restaurer l’estime de soi. Nous nous adaptons à tout public, personnes âgées, adolescents, enfants, personnes malades en accord avec une équipe pluridisciplinaire ou à la demande d’une association ou du bénéficiaire.

Je dois remonter dans les années 1998-1999 environ pour mon premier déclic. En effet à cette époque, je suis sollicitée en tant qu’esthéticienne par une amie kinésithérapeute qui me connaissait bien, pour aller faire un soin du visage le jour de la fête des mères, à une patiente en fin de vie, atteinte d’un cancer. J’avais 29 ans à ce moment là, et j’étais esthéticienne depuis une dizaine d’année. Ce fut une profonde révélation. Il y avait tant à transmettre, tant à donner, juste pour un instant … Ce nouvel espace dans mon métier me paraissait si immense et si vide en même temps. Il y avait tant à faire !

Je suis allée chez cette patiente, le dimanche de la fête des mères. Son mari et ses filles déjà résolus à l’impensable et cette patiente, Corinne, déjà partie dans sa tête. Je garde en moi cette sensation profonde d’avoir été à ma place ce dimanche matin. Oui je suis arrivée en retard à mon propre repas de la fête des mamans, mais j’ai compris ce lien à ce moment là de l’esthétique autrement et de la puissance du temps, du toucher et de l’écoute bien plus que les produits que l’on peut appliquer. La vie étant faite de belles rencontres, j’ai aussi eu la chance de croiser un jeune médecin oncologue qui m’a permis de comprendre qu’il existait plusieurs regards possible dans la maladie, et qu’il y avait un autre regard que le médical à apporter aux malades.

Le terme socio-esthéticienne ou psycho-socio-esthéticienne n’existaient pas à mon époque, mais il existait la vie, les drames, la perte de l’estime de soi, la maladie, l’exclusion etc et il existait déjà des femmes et des hommes dans la détresse, à la recherche d’une prise en main globale de leur mieux-etre et un besoin de se reconstruire, de reconstruire l’estime de soi. Il existait aussi des esthéticiennes qui pratiquaient l’esthétique différemment. On disait à cette époque qu’on pratiquait l’esthétique autrement.

Bien sur j’ai pratiqué l’esthétique traditionnel et je le pratique encore. J’ai travaillé en Institut et en parfumerie, à Besancon, en region parisienne, et dans mon sud natal.
J’ai été esthéticienne à domicile et j’ai ouvert un premier institut dans les Bouches du Rhone, puis je suis venue vivre en Vaucluse.

Toutes ces années j’ai pratiqué avec bonheur ce metier avec au fond de moi cette facon différente d’utiliser l’esthétique. La mise en application de soins esthétique adaptés est la seule pratique que je connaisse où que je sois, et je ne me reconnais pas dans l’esthétique uniquement traditionnel. Les soins de beauté sont des outils à notre disposition pour restaurer ou entretenir une belle image de soi et un mieux-etre.

J’aime être à l’écoute, partager, donner du sens et faire des rencontres. A l’époque nous etions simplement des esthéticiennes en milieu médical ou en milieu hospitalier ou associatif.

J’ai su très tardivement qu’une nouvelle formation existait qui permettait de mettre en forme avec un programme tout ce que nous faisions à l’époque. C’est tout naturellement que j’ai voulu valider cette pratique de l’esthétique autrement par une formation spécifique. Est ce que j’ai appris ? Oui bien sur, inévitablement, on apprend tous les jours et tout le temps.

J’ai eu la chance de faire mes stages de socio-esthétique dans un Ehpad, à Vaison La Romaine et j’avoue que je me suis régalée. Rendre à ces résidents tout ce que cette génération nous a transmis et voir leurs regards s’éclairer par notre simple présence.

Je suis intervenue dans des associations à caractère social avec des personnes en précarité ou en situation de handicap, ou pour des aidants.

Les structures n’ont pas les budgets pour avoir une socio-esthéticienne.
J’ai donc créé une association, Assoversoi, pour essayer de faciliter les choses.

Aujourd’hui j’équilibre mon temps entre l’esthétique et la socio-esthétique. J’interviens bénévolement dans certaines structures et je suis à l’institut en fin de semaine à Carpentras.

L’après covid est compliqué pour tous et nous ne sommes pas assez nombreuses, il y a tellement à faire.

Une socio-esthéticienne est avant tout une esthéticienne qui pratique différemment les soins esthétiques avec un toucher non médicalisé dans le but de revaloriser l’image de soi et une resocialisation pour des personnes souffrantes, fragilisées ou en détresse sociale, avec une grande qualité d’écoute. Elle est disponible, patiente, attentive, diplomate et chaleureuse face aux personnes fragilisées qu’elle rencontre.

Sandrine Orsini